mardi 7 juin 2016

CCCX ~ Petit Pierrot triste

Lingerie Chantal Thomass, veste Voriagh.
Maquillage et photographies : Alexandra Banti


Ce n’est plus le rêveur lunaire du vieil air
Qui riait aux jeux dans les dessus de porte ;
Sa gaîté, comme sa chandelle, hélas ! est morte,
Et son spectre aujourd’hui nous hante, mince et clair. 


Et voici que parmi l’effroi d’un long éclair
Sa pâle blouse a l’air, au vent froid qui l’emporte,
D’un linceul, et sa bouche est béante, de sorte
Qu’il semble hurler sous les morsures du ver. 


Avec le bruit d’un vol d’oiseaux de nuit qui passe,
Ses manches blanches font vaguement par l’espace
Des signes fous auxquels personne ne répond. 


Ses yeux sont deux grands trous où rampe du phosphore
Et la farine rend plus effroyable encore
Sa face exsangue au nez pointu de moribond.

Paul Verlaine, « Pierrot » in Jadis et Naguère


~~~

(Je vous rassure, en vrai, je ne suis pas si triste.)

3 commentaires:

  1. « Ta chandelle est morte et ton cœur aussi,
    Ton âme est dans le noir et tes yeux dans la nuit »

    Albert Fleury, Pierrot, Mercure de France (1898).

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  2. J’ai essayé de lire les vers avec la mélodie du luneux du Malicorne, mais n’y a fait, le rythme n’était pas le bon. Mais trève de divagations, faute de commenter la beauté de ce personnage presque peint, je réfléchis à une réponse poétique appropriée… Ah… j’y suis :

    «  Regar noir, déchireant,
    nul ne peux rester 1différent
    sourcille tailler au rasoir, poignée denfant
    les mins embibé de sang »

    — D’après Anonyme, in Dalektique des Belles Âmes

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    1. Et il y en a qui osent dire que la poésie c'était mieux avant.

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