samedi 21 novembre 2015

CCLXVIII

C’est sans doute la complainte la plus chantée en ces lieux : la vie quotidienne est irritante. Ainsi, lorsque je reçois quelques regrets comme quel dommage que tu ne parles plus de tes sorties, de tes activités comme tu le faisais avant, je ne sais trop quoi répondre. Sans doute, oui. Mais toutes ces musiques que je partage ici, ces poèmes que je lis chez les uns, chez les autres, sont je crois la forme plus achevée de partage de ma vie quotidienne qui me vienne à l’esprit. Lorsque je lis par exemple, chez Dante (Paradis, j’ai oublié dans quel chant) :

« Jamais cœur de mortel ne fut si disposé à la dévotion, ni aussi prompt à se rendre à Dieu de tout son gré que je devins à ces paroles, et mon amour se mit en lui si fort qu’il éclipsa Béatrice dans l’oubli. Elle n’en fut pas blessée, mais elle elle rit, et la splendeur de ses yeux riants divisa en morceaux mon âme unie. »

je vibre ardemment face au sentiment d’amour infini que le poète décrit face à Béatrice, et le publier à mon tour ici, en me disant que cela touchera peut-être un cœur autre que le mien, me remplit bien plus de joie qu’ajouter un peu d’inintérêt à celui qui pullule déjà trop.


Ceci est d’autant plus vrai en ces temps troublés, alors que je suis convaincue, depuis bien longtemps, que la puissance des arts est telle qu’elle peut sauver bien des situations délicates, même politiques, même belliqueuses…

Je passe tant de temps le nez dans les livres, à en rêver, en acheter beaucoup trop, à les dévorer ou les repousser d’un éclat de voix (je suis violente en fait, quand je n’aime pas…) qu’il est impossible d’imaginer cet endroit sans que poèmes et citations ne prennent une grande place, parce qu’ils représentent la majeure partie de mon existence. Et cela ne fait qu’empirer !

J’ai vu certaines personnes tristes que Paris soit silencieuse ces derniers jours. Sortir à la terrasse d’un bar n’est pourtant pas la seule façon de « résister ». Restez chez vous si c’est ainsi que vous vous sentez le mieux, seul ou avec vos proches, mangez, riez, buvez, aimez, et surtout, lisez, lisez… ! jusqu’à en perdre la notion du temps. Jusqu’à ce que vos lectures, de divertissantes, gagnent en noblesse et deviennent essentielles. Jusqu’à ce qu’elles déracinent l’ennui, le désespoir, et tous les dramatiques rejetons des tristes habitudes.

4 commentaires:

  1. L'extrait a fait vibrer mon cœur...je ne vis que pour l'emphase, les situations déchirantes, la décadence et l’amour dévorant (et les smoothies à la banane et aux dattes). Pourtant, la poésie ne me touche pas particulièrement....je suis bien trop exclusive et passe mon temps à lire du Stephen King depuis que Danse Macabre m'est tombé sur la tête et m'a, sans doute, cabossé la boîte crânienne. En d'autres termes je ne ressens pas le besoin physique de diversifier ma lecture, car mes tripes sont estampillées S.K, mais quand je parcours tes articles...j'aimerais que tu me guides dans tes lectures (j'ai noté du coup sur mon carnet Dante - Paradis). Tu me touches, tes testes expriment à la perfection les pensées qui me parasitent parfois l'esprit (saleté de vie quotidienne). J'aspire à autre chose et tu expires à travers ton souffle, ce malaise. Ça me fait réfléchir mais ça me fait sourire aussi (une sorte de soulagement post mortem je suppose).

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    1. Les smoothies banane/dattes peuvent être source d’amour dévorant !
      Nous avons tous nos côtés exclusifs, car il est compliqué de s’intéresser à tout en même temps, notre nature limitée nous oblige à être sélectifs dans nos centres d’intérêt et dans nos lectures… Par exemple, je connais vraiment mal Stephen King, j’ai dû lire deux de ses livres (ce qui n’est rien face à sa colossale production !), et du coup, tu me donnes envie de m’y remettre un peu… En tout cas je suis heureuse que ce que je livre ici te touche, car ce partage est bien la seule chose qui me motive à continuer d’écrire ici, maintenant que l’objectif thérapeutique de ce blog a été dépassé. Merci du fond du cœur pour ton commentaire, vraiment !

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  2. C'est d'autant plus important que tes morceaux choisis sont toujours bien sélectionnés, commentés et espacés aussi, pour ne pas multiplier les ambiances (ha, je prends ton blog pour une bougie) sans prendre le temps de les savourer. J'espère un jour avoir le déclic qui placerait certains de ces livres dans ma liste de livre à lire (qui n'est pas longue car je n'y mets que ce qui vaut pour l'avenir proche, quitte à être en retard).

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    1. Je prends mon blog pour une bougie aussi.

      J’aimerais avoir ton réalisme, la mienne ne cesse de s’allonger sans jamais se réduire, ce qui conduit à pas mal de frustrations – mais heureusement à de belles découvertes, aussi.

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